La capitale du sud du Sénégal renoue enfin avec son destin maritime. Après des mois d’atermoiements et de blocages administratifs, les navires de pêche sont officiellement autorisés à débarquer leurs produits au port de Ziguinchor. L’annonce, faite par la ministre des Pêches, des Infrastructures maritimes et portuaires, Dr Fatou Diouf, lors d’une visite de travail dans la région, marque une étape majeure dans la redynamisation du secteur halieutique en Casamance. Dans le même élan, la ministre a confirmé la pose imminente de la première pierre du quai de pêche de Cap Skirring, projet emblématique inscrit dans le cadre du « Plan Diomaye pour la Casamance ».
Une mesure longtemps attendue
« Le port de Ziguinchor est de nouveau ouvert au débarquement des produits de pêche », a déclaré Dr Fatou Diouf au terme d’une journée marathon de visites et de rencontres avec les acteurs du secteur. Cette décision, matérialisée par un nouvel arrêté ministériel, vient abroger une mesure prise dès son installation au ministère qui limitait les débarquements aux seuls ports jugés conformes aux normes sécuritaires, notamment celui de Dakar.
Cette restriction avait porté un coup dur à l’économie maritime locale, contraignant les pêcheurs à rallier Dakar pour y écouler leurs captures, au prix de frais logistiques élevés et d’un allongement des délais de distribution. La levée de cette mesure est perçue comme une véritable bouffée d’oxygène par les acteurs locaux, qu’ils soient issus de la pêche artisanale ou industrielle. « Cette autorisation est une victoire pour la Casamance. Elle va redonner vie au port, relancer l’activité économique, créer des emplois et renforcer l'autonomie des femmes qui travaillent dans la transformation des produits halieutiques », s’est réjouie la ministre.
Une tournée sous le signe de l’écoute et de l’engagement
Accompagnée de ses principaux collaborateurs et des services techniques de son département, Dr Diouf a entamé sa visite par une inspection des infrastructures existantes : le port de Ziguinchor, le quai de pêche de Boudody, les sites de transformation de produits halieutiques ainsi que plusieurs entreprises privées implantées dans la région, telles que Global Trading Commodities, Daily Rise, Casa Linda et Senefand.
Partout, la même dynamique : « un potentiel halieutique sous-exploité, un tissu économique en demande d’investissements, et une population d’acteurs engagés mais confrontés à d’importantes contraintes logistiques et matérielles » constate la ministre. Parmi les principales préoccupations soulevées par les acteurs, cite Dr Diouf, la vétusté des installations, l’absence de clôture pour sécuriser certains sites, le manque d’équipements modernes pour la transformation et la conservation des produits.
Soutien aux femmes transformatrices de Boudody
L’étape de Boudody a particulièrement ému la délégation ministérielle. Le site, occupé en majorité par des femmes transformatrices, a récemment été ravagé par un incendie, provoquant des pertes importantes en matériels et équipements. En réponse, Dr Diouf a annoncé un appui immédiat en matériel d’une valeur de 25 millions de F Cfa, composé notamment de balances, de glacières, de coffres, de bagues de marquage, de gants et d’autres accessoires nécessaires à leurs activités quotidiennes.
Mais au-delà de l’aide matérielle, la ministre a mis l’accent sur les problématiques structurelles : « Les femmes nous ont signalé l’insécurité chronique de leur site à cause de l’absence de clôture. J’ai donné des instructions fermes au directeur des Industries de transformation pour qu’une visite technique soit organisée rapidement. Nous allons sécuriser ce lieu et améliorer leurs conditions de travail. »
Cap Skirring en ligne de mire, la pêche comme levier de développement
L’autre grande annonce de la journée concerne le lancement imminent des travaux du quai de pêche de Cap Skirring. Une infrastructure qui s’inscrit dans la vision du président de la République, Bassirou Diomaye Faye, pour une Casamance pleinement intégrée au développement national. Ce projet sera piloté dans le cadre du Cemrem (Centre d’émergence maritime et de résilience économique en milieu rural), un programme ambitieux qui vise à moderniser les infrastructures halieutiques tout en créant des pôles d’emplois dans les régions périphériques. « Je reviendrai bientôt pour la pose de la première pierre. Ce projet est prioritaire. Il répond à une exigence de justice territoriale et permettra de mieux valoriser les ressources halieutiques locales tout en offrant de meilleures conditions de travail aux pêcheurs », a assuré la ministre.
Une volonté politique forte au sommet de l’État
Dr Fatou Diouf n’a pas manqué de rappeler que le secteur de la pêche bénéficie d’une attention particulière au plus haut niveau de l’État. Le tout premier Conseil des ministres thématique du nouveau régime a été consacré à ce domaine, preuve, selon elle, de l’importance stratégique accordée à la mer et ses métiers. « Le président de la République et le Premier ministre ont été clairs : nous devons obtenir des résultats concrets pour ce secteur qui nourrit des milliers de familles, qui fait vivre nos ports, et qui contribue à notre sécurité alimentaire », a-t-elle insisté.
Des perspectives encourageantes
Outre le quai de Cap Skirring, d’autres projets sont à l’étude dans la région, notamment dans le domaine de l’aquaculture, sous la houlette de l’Agence nationale de l’aquaculture (Ana). L’objectif est d’élargir les filières, de diversifier les sources de revenus pour les pêcheurs et de mieux intégrer les jeunes et les femmes dans les chaînes de valeur.
À Ziguinchor, cette tournée ministérielle a fait renaître l’espoir d’un secteur halieutique enfin pris au sérieux, soutenu par l’État, et aligné sur les réalités locales. L’autorisation de débarquement des navires est un symbole fort, mais aussi un point de départ vers une véritable relance économique du sud du pays.